Pourquoi contrer le Covid 19 peut aussi servir à contrer le changement climatique

28 mars 2020

Articuler les initiatives de terrain et les décisions des gouvernants

Pourquoi s’investir dans une initiative citoyenne de fabrication massive de masques artisanaux, validés, contre le Covid 19 ? Pourquoi tenter d’inventer depuis le terrain une organisation pour territorialiser une politique publique ?

Parce qu’il y a un champ aveugle en matière de politique publique : le recours organisé au terrain qui peut apporter des solutions que nous ne pourrons pas fabriquer autrement. Pendant cette crise sanitaire, aucune usine, aucun groupe ne peut aligner 300 000 machines à coudre avec leur couturières (iers) et survivre après la crise : en une page, http://agirlocal.org/aide-aux-soignants-puis-tous/

Une organisation transverse, citoyens-élus-préfet, le peut. Et peut aussi se retirer progressivement au retour à la normale.

Cette crise sanitaire peut apporter des solutions, mais aussi servir comme une sorte de première répétition pour passer les crises à venir.

L’objectif du « tout va devoir changer, nous n’en sommes qu’a début» a été énoncé par le président de la république. Il reste à en inventer les modalités concrètes.

Pour mettre en route une telle organisation transverse, il apparait utile de transposer sur ce sujet mortel immédiat qu’est la crise sanitaire l’organisation proposée en matière de climat.

La vitrine à projet et l’ingénierie publique tiers de confiance, évoqués notamment à la tribune à l’ESSEC, au lancement de l’initiative « Penser local pour agir Global » apparaissent en faire partie.

Si nous disposions aujourd’hui de la vitrine à projet et du tiers de confiance pour le climat (voir ci-après), la question des patrons de masque artisanaux validés et de la mise en œuvre de leur fabrication encadrée (fourniture normée, couture et distribution) ne se poseraient pas. Il est assez paradoxal qu’à fin mars 2020, un tiers des actifs sortent pour faire tourner le pays et qu’on ne les confinent pas derrière un masque, au moins; pour qu’ils protègent les autres et se protègent d’eux.

I-En matière de climat, nos politiques publiques ont un champ aveugle :

Les 25 COP et les politiques nationales depuis le Grenelle de l’environnement ont fait la démonstration de leur nécessité mais aussi de leurs limites, sans actions locales efficaces, massives, articulées avec les injonctions nationales.

A lire les rapports des scientifiques du climat, il ne reste pourtant que deux mandats municipaux avant le déclenchement des 2°C de réchauffement de l’atmosphère.

La proposition d’ingénierie publique tiers de confiance envoyée au grand débat et à la convention citoyenne esquisse une réponse à la double question suivante :

Pourrait-on s’organiser pour construire des projets de transition locaux, efficaces, massivement reproductibles, pour écarter la menace climatique et avec elle traiter les 3 autres crises, sociales, financières, économiques ?

Comment articuler les injonctions gouvernementales avec les initiatives citoyennes ?

II- Une ingénierie publique, tiers de confiance ;

Il n’existe probablement pas de solution miraculeuse mais des organismes publics territoriaux, opérationnels publics, tiers de confiance, transverses aux 6 étages de gouvernement, de la commune à l’Europe, peuvent incarner l’intelligence collective nécessaire.

Pas pour débattre et repartir chacun dans son coin, non, pour construire des projets ensembles, pragmatiquement, dans la durée : les 6 étages de gouvernants et les français.

Ils peuvent contribuer à rétablir du lien, de la confiance, dans l’action menée ensemble sur le terrain, citoyens, entreprises, élus, préfets ; pas avec des discours, mais bien avec des actes, au plus près du terrain. En transverse.

Car pour agir ensembles, nous avons besoins de gens qui savent, agissent en mode projet, soient capables d’aider les acteurs de terrain, les citoyens à monter leurs projets ensembles. Autrefois, sous une autre forme et à destination des seules communes cela s’appelait l’ingénierie publique. Les maires ruraux lui faisaient confiance.

Economiser du CO2 donne du pouvoir d’achat, augmente le bien-être et crée de l’emploi. Cela ne devrait pas être politiquement dissuasif. Avec cette augmentation de pouvoir d’achat, on peut investir dans le renouvelable, le bien-être, diriger la création monétaire sur l’économie réelle plutôt que sur la spéculation.

III-Quelle forme le tiers de confiance pourrait-il prendre ? Esquisse :

« Un organisme public, tiers de confiance, est créé dans chaque département et intercommunalité de plus de 200 000 habitants. Il a pour mission d’aider les citoyens, les petites entreprises locales, les élus locaux à monter des projets opérationnels de leur initiative visant à réduire massivement les émissions de gaz à effet de serre. Il capitalise et diffuse les expériences réussies, met à disposition l’ensemble des éléments qui permettent leur reproduction, leur amélioration. »

Cette proposition suppose la création progressive de 150 agences, dont 100 départementales financées par l’Etat et les départements et 50 urbaines financées par les collectivités concernées et par l’Etat. La moitié des postes pourrait être occupée par des titulaires en place des collectivités ou des directions territoriales de l’Etat et de l’Ademe ; elle fournit l’occasion d’améliorer une décision qui s’est avéré contre productive telle que : les ressources humaines de l’Etat d’un côté et l’argent de l’Etat à l’Ademe de l’autre.

Concentrées sur les projets, le nombre d’agences est un atout car chacune peut se centrer sur tel ou tel type de projet issu de son territoire et diffuser aux autres ; ensembles elles peuvent pointer les projets à construire et s’organiser pour combler les manques collectivement.

Composées de professionnels venant de tous horizons et de toutes les structures, réunies par une mission motivante, chaque fois sous la direction d’un professionnel soigneusement choisi pour ses compétences, elles tractent les projets, préparent les décisions, sous le regard des autres.

Ensembles, elles permettent une prise en main méthodique et industrielle du sujet, le contraire des politiques d’incitation qui se soldent par l’actuelle course aux guichets et le gâchis d’argent public saupoudré, faute de ce tiers professionnel de confiance, responsable global sur un territoire.

IV quelle valeur ajoutée ?

Est-ce un 7ème étage de gouvernement? Surtout pas : il s’agit de constituer une communauté de projets sur des territoires à géométrie variable avec les projets.

En réseau, horizontal, chaque agence part du bilan carbone de chaque territoire, fournit par l’Insee, s’est doté de la panoplie d’actions qui produisent des économies d’argent en économisant du C02 et finance les projets avec le pacte finance climat. Voir les 4 propositions versées au grand débat national : http://agirlocal.org/grand-debat-national-4-propositions/

Ce qui permet aussi de monter des projets pour la puissance publique, ou à partir d’elle :

-Exemple concret : l’efficacité énergétique des bâtiments de la puissance publique sur un territoire : mairies, écoles collèges, lycées, hôpitaux, Préfectures… Un même diagnostic, mené par les services respectifs dans un cadre commun, un plan d’action co-construit, dans la durée, créateur d’emplois locaux, un même appel à prestataires qualifiés pour mener à bien ce qui doit l’être et développer un vivier d’entreprises auxquels les particuliers puissent faire appel. Voir : http://agirlocal.org//wp-content/uploads/sites/15685/2016/02/20160625-fiche-action-collectivite%CC%81s-et-e%CC%81tablissements-publics.pdf

-Autre exemple : la précarité énergétique d’une veuve âgée dans son pavillon trop grand peut être réglée par la colocation à de jeunes étudiants, ce qui permet avec l’argent des loyers, de rénover thermiquement le pavillon ; une banque garanti la bonne fin de l’opération en cas de décès de la veuve. Le Crous, la SEM à énergie positive en Île de France (elle a changé de nom), les prêts à taux zéro, sont là. Il manque le tiers de confiance pour finaliser le projet. Voir pages 55-60 de http://agirlocal.org//wp-content/uploads/sites/15685/2016/02/synthese_transition_2014_part_ii_-_web.pdf

La création de tiers de confiance crée une nouvelle forme de démocratie dans l’action. Une nouvelle forme de démocratie qui ne revient ni sur la démocratie représentative, ni sur l’organisation des pouvoirs publics. Une forme de démocratie qui fédère par projet, local. Une organisation qui met en mouvement 30 millions de ménages, 5 millions d’entrepreneurs, plusieurs centaines de milliers d’élus locaux.

Une puissance de changement sans égale.

Et qui laisse entière la responsabilité de nos gouvernants. Il y a bien d’autres matières à décider de nos biens communs qui ne peuvent l’être que par ceux que l’on a élu pour cela.

Articuler les initiatives de terrain et les décisions des gouvernants, n’est-ce pas une bonne question ?

L’annexe ci-après récapitule en une page des initiatives citoyennes prises pour aller en ce sens, rédigé dans le cadre des municipales.

Jean-Michel Vincent

Délégué Val d’Oise

d’Agir pour le Climat

Novembre 2020

Annexe

Agir local pour contrer le changement climatique

Les 25 COP et les politiques nationales depuis le Grenelle de l’environnement ont fait la démonstration de leur nécessité mais aussi de leurs limites, sans actions locales efficaces, massives.

A lire les rapports des scientifiques du climat, il reste deux mandats municipaux avant le déclenchement des 2°C de réchauffement de l’atmosphère.

1- C’est pourquoi, au vu des expériences de terrain de plusieurs milliers d’acteurs locaux, il est apparu utile de faire 5 propositions de décisions nationales : http://agirlocal.org/5-decisions-a-prendre/

Elles ont été postées à la convention pour le climat.

2- C’est pourquoi, sans attendre ces décisions et leur mise en oeuvre, un tableur a été fabriqué, adossé aux données du Haut Conseil pour le Climat : il permet de calculer l’empreinte carbone de chacune des 35 000 communes de France, de leur intercommunalité et jusqu’à la région ; il est gratuit et calculable en bien moins d’une heure.

L’empreinte carbone permet de mesurer par exemple si les projets proposés par les candidats aux municipales sont de la décoration verte ou un plan d’action efficace. Et pour nous même d’agir efficacement : http://agirlocal.org/mode-calcul-emissions-co2e-a-la-commune/

3- Il est intégré dans un kit transition  qui propose des solutions concrètes mises au point par plusieurs milliers d’acteurs locaux ainsi qu’un ppt de lancement local : http://agirlocal.org/kit-transition-locale/

On y constate qu’économiser du C02 donne du pouvoir d’achat que l’on peut réinvestir dans la transition.

4- Il est complété par un dossier formation transition qui comprend, outre le kit transition locale :

– Un 2 pages grand public pour introduire un échange citoyen en réunion publique,

– Un ppt de formation à destination des acteurs motivés pour agir local. Il clôt sur un dispositif pour agir ensemble localement, efficacement.

– Une note de méthode d’une page, à discuter, adapter et partager entre élus, citoyens et entrepreneurs d’un conseil du développement durable pour contrer ensemble la menace climatique.

Il est téléchargeable à: http://agirlocal.org/kit-formation-agir-local/

Cet ensemble pourrait être utilisé pour les programmes des équipes qui se présentent aux municipales.

Jean-Michel Vincent

www.agirlocal.org

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