lettre à Thierry Coulhon

Jouy le Moutier le 15 novembre 2020

Monsieur,

En lisant l’article du Monde qui vous est consacré, j’ai pensé utile d’attirer votre attention sur deux anomalies (dont j’ignore ce que vous en connaissez). Je le fais d’autant plus que votre parcours signe des préoccupations au delà de votre actuelle mission et donc l’accès à un réseau de décideurs en conséquence.

La première anomalie porte sur le changement climatique et l’action locale propre à contribuer à l’écarter. En deux mots, l’urgence est déclarée jusqu’au plus haut niveau de l’Etat mais l’empreinte carbone n’est pas calculée à la commune par les pouvoirs publics pour être mise à disposition des élus locaux mais aussi des habitants et de entrepreneurs du cru. Comme si Pasteur s’était intéressé à la fièvre et avait négligé les microbes, évité d’inventer la vaccination. 30 millions de ménages, parmi lesquels 5 millions d’entrepreneurs et une demi millions d’élus locaux doivent bien valoir quelques milliers de décideurs brillants. On connaît le fonctionnement en silos et le gisement de solutions qu’apporte le travail en transverse. L’approche territoriale est transverse par nature, multidimensionnelle par construction. L’empreinte carbone locale est une matrice de découverte. Plus largement, l’évaluation territoriale est un levier de mise en mouvement efficace des acteurs locaux.

Il y a un an, j’ai jeté aux orties mes réserves de haut fonctionnaire à la retraite et tiré les conséquences de cette situation ; en deux pages : https://agirlocal.org/pourquoi-comment-agir-local/  Mais il serait productif que la recherche s’intéresse à cette anomalie et plus encore qu’elle développe, avec des moyens sans commune mesure avec les miens, les outils que j’ai pu esquisser.

La deuxième anomalie est identifiée de longue date. On sait les bureaucraties centrées sur leur nombril et ignorer ceux qu’elles sont censées servir. Le service public devient le public qui sert le service. C’est le cas en matière d’efficacité énergétique. La récente invention du service d’accompagnement de la rénovation énergétique en est un chef d’œuvre. Usine à gaz pour les porteurs de projet locaux, elle est propre à écoeurer les meilleures volontés.

Sauf à penser dans le cas évoqué que le montage est prémédité et vise un tout autre objectif, là aussi la recherche pourrait éclairer les modes d’organisation ; pas seulement sur cet étroit mais vital exemple. Les cas de systèmes internet fermés sont innombrables ; à la façon du gag du rond point cher à Raymond Devos où l’on rentre sans problème mais d’où l’on ne peut sortir, toutes les issues étant en sens interdit. Quiconque a tenté de se procurer sa carte grise par internet sait de quoi il s’agit. Les sites d’organismes privés ne sont pas en reste, la législation bancaire non plus.

La construction d’outils qui centrent l’organisation quelle qu’elle soit sur celles et ceux qu’elle sert et non l’inverse serait un pas décisif ; contraindre ensuite tout  changement d’organisation à passer par un test pratique par les utilisateurs potentiels est une deuxième étape, évidemment politique. Surtout si elle conduit à obliger par la loi à tenir un centre d’appel qui ne commence pas par vous êtes mort, tapez un. Et ne finit pas par vous êtes trop nombreux rappelez plus tard puis raccroche.

Tant qu’à faire de la recherche, il ne me paraît pas inutile de chercher aussi ce qui peut servir à vivre mieux, encore plus à survivre. Sur un cas très particulier, j’ai développé avec quelques centaines puis quelques milliers d’acteurs locaux un outil qui décompose le système que nous faisons avec la terre et la biomasse en une douzaine de dimensions.  Exprimée en termes de vie quotidienne, locale, cette auto évaluation (@d aménagement durable) a fait la démonstration de son intérêt par les développements qu’elle a suscité. https://agirlocal.org/par-ou-commencer/

En espérant n’avoir pas enfoncé trop de portes ouvertes,

Très cordialement

Jean-Michel Vincent

0620721336

PS je vous envoie aussi cette lettre par courrier

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